Jamais un document administratif n’aura fait couler autant d’encre et de larmes que la pension de réversion. À l’heure où le mariage ne séduit plus autant, ses conséquences financières, elles, persistent. Les chiffres sont implacables : aucun droit à la réversion n’est accordé aux couples pacsés ou vivant en concubinage, quelle que soit la durée de la vie commune. Le mariage, lui, reste le sésame, mais il n’est pas toujours synonyme de sécurité. Car derrière la promesse d’une protection, chaque régime de retraite applique ses propres règles, parfois difficiles à anticiper.
Le versement de la pension de réversion n’est jamais définitivement acquis. Une nouvelle union, un changement de situation ou une hausse des revenus peuvent tout remettre en question. Selon le régime, la pension peut être maintenue, suspendue ou supprimée sans préavis. Ce patchwork de règles ouvre la porte à de nombreuses incertitudes, où l’on navigue entre espoir et inquiétude à chaque étape de la vie conjugale.
Mariage et pension de réversion : ce que dit la loi
Le dossier de la pension de réversion n’a rien d’anodin. En France, un seul critère fait foi : avoir été marié au défunt. Ce droit s’étend aussi à l’ex-conjoint, à condition que le mariage ait officiellement existé. Le PACS et le concubinage, eux, sont écartés d’office par le Code de la Sécurité sociale. Aucune exception, même en cas de vie commune longue ou de solidarité manifeste.
La nature du régime de retraite complique encore la donne. Le régime général (Assurance retraite, MSA) conditionne la pension de réversion à un plafond de ressources de 24 232 € brut par an pour une personne seule. À l’inverse, l’Agirc-Arrco ne regarde pas les revenus, mais exige que le conjoint survivant ait au moins 55 ans et ne se soit pas remarié. Les conditions d’accès varient, et les conséquences d’un changement de situation matrimoniale sont loin d’être anecdotiques.
Voici un aperçu précis des principales règles selon les régimes :
- Assurance retraite (régime général) : la pension est attribuée sous condition de ressources au conjoint ou à l’ex-conjoint marié. En cas de plusieurs unions, chacun reçoit une part au prorata du temps de mariage.
- Agirc-Arrco : aucune condition de ressources, mais la pension disparaît en cas de remariage ou de vie en couple assimilée.
- Service des Retraites de l’État : le remariage entraîne la suppression pure et simple de la pension. Parfois, elle peut être attribuée aux enfants orphelins.
Un fonctionnaire peut aussi prétendre à la pension de réversion de son conjoint si celui-ci était salarié du privé. Malgré plusieurs tentatives à l’Assemblée nationale pour ouvrir ce droit aux couples pacsés, rien n’a changé : seul le mariage reste la clé d’accès à la pension de réversion.
Quelle durée de mariage faut-il respecter pour conserver ses droits ?
Le temps passé marié joue un rôle décisif dans le calcul de la pension de réversion, surtout si le défunt a eu plusieurs conjoints. Aucune durée minimale n’est imposée pour demander la pension dans la plupart des régimes, mais la répartition s’effectue toujours selon la durée de chaque mariage.
En clair, plus la vie commune officielle a duré, plus la part de pension est conséquente. Prenons un cas concret : un défunt s’est marié dix ans avec une première épouse, puis vingt ans avec une seconde. La première percevra un tiers de la pension, la seconde deux tiers. Tout se joue donc sur la ligne du temps de chaque union.
Pour clarifier la manière dont la pension est répartie, voici les situations qui peuvent se présenter :
- Si le défunt n’a eu qu’un seul mariage, le conjoint survivant touche l’intégralité de la pension.
- En cas de plusieurs mariages, chaque ex-conjoint reçoit une fraction de la pension, calculée selon le nombre d’années de mariage avec le défunt.
Le PACS et le concubinage n’entrent jamais en ligne de compte dans ce calcul : seul le mariage officialisé est pris en considération. Cette règle s’applique aussi bien au régime général qu’aux régimes complémentaires type Agirc-Arrco. Ce n’est donc pas la longueur du mariage qui ouvre le droit, mais son existence officielle et sa durée comparée aux autres unions du défunt.
PACS et concubinage : quelles différences face à la pension de réversion ?
La confusion persiste dans bien des esprits : le PACS ou le concubinage donnent-ils accès à la pension de réversion ? La réponse est catégorique : non, quel que soit le régime de retraite concerné. Le Code de la Sécurité sociale réserve ce dispositif exclusivement au conjoint survivant et, le cas échéant, à l’ex-conjoint issu d’un mariage.
Un partenaire pacsé, même après des années de vie commune, ne peut pas prétendre à la pension de réversion. Le concubin non plus, même si la relation a duré toute une vie. La règle est stricte : sans mariage, pas de réversion, ni dans le privé, ni dans la fonction publique, ni pour les affiliés à la MSA. Plusieurs propositions pour élargir ce droit aux couples pacsés ont été discutées au Parlement, sans succès.
Pour éviter toute ambiguïté, rappelons les statuts concernés :
- Le mariage reste le seul cadre reconnu pour ouvrir la pension de réversion.
- PACS et concubinage sont systématiquement exclus, peu importe la durée de vie commune.
Ce statu quo continue de faire débat, mais la loi ne bouge pas. À ce jour, la perte d’un partenaire pacsé ou d’un concubin ne donne donc lieu à aucun versement de réversion, quels que soient les droits acquis ou la situation familiale. Le mariage conserve ici un poids juridique que rien d’autre ne remplace.
Perte ou maintien de la pension : dans quels cas les droits sont-ils remis en cause ?
La pension de réversion n’est jamais garantie à vie. Plusieurs situations peuvent en priver le bénéficiaire, parfois du jour au lendemain. Le remariage figure au premier rang des causes de suppression : dans le régime général, la pension persiste, mais chez Agirc-Arrco ou dans la fonction publique, elle prend fin aussitôt que le bénéficiaire se remarie ou vit en couple de manière officielle.
Autre élément à ne pas négliger : les ressources du foyer. Le régime général impose un plafond strict (24 232 € brut/an pour une personne seule, 38 771,20 € pour un couple). Dépasser ce seuil entraîne une suspension ou une réduction de la pension, voire sa suppression si le cap des 39 536,64 € est franchi. L’Agirc-Arrco, lui, ne tient pas compte des revenus.
L’âge d’accès à la pension constitue également un filtre : il faut attendre 55 ans pour le régime général, 60 ans chez Agirc-Arrco, sauf exceptions particulières. Enfin, certaines circonstances aggravantes, comme une condamnation pour violences conjugales ou pour homicide, excluent tout versement de pension de réversion.
Pour accéder à la pension, la constitution d’un dossier de réversion complet est obligatoire auprès de chaque régime concerné. Une fois la retraite liquidée, la pension de réversion devient définitive : aucun retour en arrière ni révision n’est possible après coup.
Le cadre est donc posé, mais les variations d’une situation à l’autre exigent une vigilance constante. Face à la complexité du système, on avance souvent à tâtons, sans certitude sur la suite. Mais une chose est sûre : le mariage, dans ce domaine, ne se contente pas d’être un acte symbolique. Il façonne concrètement le futur financier, bien après que la robe blanche ait rejoint le grenier.

